Dernière ligne crochue !

Editorialiste, Le National Haiti.

La mauvaise foi, l’égoïsme, l’opportunisme engluent le pays dans un scénario absurde, aux finales toujours prévisibles qui nous rapprochent chaque jour de l’abîme. Les uns et les autres interprètent les derniers évènements à l’aune de leurs propres intérêts, ce qui n’est pas condamnable au premier abord sauf que certaines explications erronées, farfelues, ne peuvent qu’empirer une situation. Une mauvaise propagande veut faire croire que tout ce qui est arrivé cette fin de semaine aurait été planifié. Dans un pays où ce qui se présente actuellement comme l’opposition, manifestement, n’a aucune force de convocation, on aimerait connaître ce groupe qui aurait la capacité de réaliser une telle opération. Disposant de cette force, le pouvoir politique basculerait de son côté. C’est totalement stupide. Ceci dit, avec l’incompétence des hommes en place n’ayant pas réagi dès le début des troubles, ce qui est exigé d’un dirigeant, des bandits, des profiteurs, ont eu toute liberté de planifier durant la nuit les saccages et les pillages que l’on sait.

Nous sommes dans une zone plus que trouble alors que pour beaucoup de citoyens englués dans leur confort, les choses ont changé de couleurs seulement après le fatidique Brésil- Belgique. Pour des dizaines de milliers d’Haïtiens dans les quartiers au sud-ouest de la ville, le cauchemar a commencé depuis longtemps. Incendies des marchés publics. Insécurité. Les gangs ont institué leur loi partout, avec droit de vie ou de mort sur la population. Personne ne pose la question à savoir d’où viennent ces armes que détiennent des gens n’ayant pas les moyens de se les procurer. Mais visiblement, tout ne se passe pas trop comme prévu pour certains cerveaux dont toutes les stratégies démontrent un traditionalisme écoeurant. On continue à distribuer des armes comme tous les pouvoirs l’ont toujours fait, sauf qu’en fin de compte, ces armes ne serviront pas grand-chose sinon à alimenter l’insécurité et des groupes armés ce qui risque, on a toujours pressé la sonnette d’alarme, de nous plonger dans une situation à la somalienne.

La nation a maintenant un besoin urgent d’homme d’État, pas de «chef » dans le sens haïtien du terme. Le « chef » comme on le conçoit n’a aucune responsabilité envers la communauté. Il exerce le pouvoir et jouit de privilèges. À la limite même, comme a eu à écrire un malade mental sur les réseaux sociaux, le pouvoir vient de Dieu. Même dans une élection démocratique ! On comprend alors que, pour certains, la démocratie n’est qu’un système qui autorise pendant quatre à six ans, à faire ce qu’on veut, à étriper un pays en toute légalité. Au moins, en dictature, on peut, en toute légalité, chasser un tyran, un incompétent.

On ne peut plus jouer à ce même jeu. Reprendre encore et encore comme des fous la même partition. On ne peut pas avec encore et encore les mêmes hommes, tous insipides et aux ordres, penser qu’on peut aller dans une autre direction. On ne peut pas laisser des fous proposer de résoudre un problème en jouant de la répression comme aux beaux jours de la dictature. L’heure est à la rupture, une rupture qui doit être pensée avec intelligence, une rupture qui peut se faire en préservant la paix publique, les vies et les biens. Car, chacun de nous le sait, même si nous professons des idées malhonnêtes, juste pour sauvegarder l’os qu’on nous jette de la table, que cette situation inacceptable nous éloigne jour après jour de l’Humain.

Gary Victor, Extrait Journal Le National.

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