Le tea party, défait mais pas vaincu

1912-TeaParty

Le chef de la majorité républicaine à la Chambre des représentants, John Boehner, lors de son disocurs très critique envers le tea party le 12 décembre dernier.
Isolés depuis le vote par le Congrès d’un accord budgétaire entre les deux partis, les ultraconservateurs du tea party ne déposent pas les armes. Les leaders du mouvement cherchent à galvaniser les militants.

De Greenville, Caroline du SudQuatre jours se sont écoulés depuis que le président de la Chambre des représentants [et chef du groupe républicain] John A. Boehner a éreinté les groupes les plus conservateurs, pour s’être opposés à un budget mettant d’accord les deux partis [voir ci-contre] : il leur a dit qu’ils avaient “perdu toute crédibilité”, qu’il se fichait de ce qu’ils faisaient et d’autres choses interprétées comme une déclaration d’indépendance vis-à-vis du tea party, ce mouvement qui a tenu le Parti républicain sous son emprise.En ce lundi soir, loin de Washington, dans un restaurant nommé Tommy’s Country Ham House, ces gens qui se sont sentis insultés par les remontrances de Boehner se réunissent. Ils sont environ 150 et ils viennent montrer qu’ils ne sont pas encore finis.

Malgré les sondages disant que le tea party n’a jamais été aussi impopulaire, Mary Beth Green débarque dans une voiture ornée d’un autocollant affirmant : “Je suis une Américaine libre”. Bien que l’accord budgétaire auquel ils se sont férocement opposés soit sur le point d’être approuvé par le Congrès, Linda Weeks se présente avec des tee-shirts proclamant “Liberté économique en action” et Debbie Spaugh avec un drapeau d’un blanc immaculé qu’elle accroche près du sapin de Noël dressé dans un coin.

“Americans for Prosperity [Américains pour la prospérité] – Caroline du Sud – Vraie réforme, vraie croissance, vraies chances”, peut-on y lire.

Mode de vie

L’événement a été planifié de longue date : un dîner gratuit pour le lancement de la 35e section régionale de l’organisation anti-impôts et anti-réglementations fondée par deux frères milliardaires, Charles et David Koch. Tim Phillips, le président du groupe, précise qu’il n’a pas été organisé en réaction aux paroles de Boehner ni dans le cadre d’une “guerre quelconque au sein du parti”.

Mais le sentiment d’être attaqués a assombri l’humeur des militants qui franchissent la double porte en verre du Ham House, un défilé de visages et de noms devenus familiers à force de se voir dans les listes d’adresses email, les meetings du tea party, les réunions dans les salons.

“Content de vous voir, M. Rickard”, dit quelqu’un à Alan Rickard, 57 ans, qui se présente comme un “envoyé” de la section du Tea Party dans le comté d’Orangeburg, en Caroline du Sud, et dit être d’accord avec ce que [le très conservateur] animateur de radio Rush Limbaugh a déclaré un peu plus tôt dans la journée : le mouvement “tea party” est un “mode de vie” qui ne mourra jamais.

Il prend place dans la queue devant le buffet, où se trouve Bob Dowd, 70 ans, officier de police à la retraite. “Je crois qu’il faut remplacer Boehner, je crois qu’il ne comprend pas où nous allons”, commente-t-il. “Bien dit, Bob”, approuve sa femme.

Signes des temps

Bob Dill, 80 ans, rédacteur en chef du Times Examiner [un hebdomadaire local conservateur] – dont la devise est le verset 16.3 de Matthieu : “Ne pouvez-vous pas discerner les signes des temps ?” – va et vient dans la salle.

Il ne croit pas à ces sondages qui affirment que les conservateurs du tea party perdent en popularité. “Je pense que les dirigeants du Parti républicain prennent leurs désirs pour des réalités”, explique-t-il. “Je me sens gonflé à bloc.”

Mary Beth Green et Linda Weeks font circuler une pétition contre la loi d’Obama sur la santé. “Voulez-vous signer ?”, demande Mary Beth. “Tout pour aider un patriote”, dit un homme.

Puis Tim Phillips s’adresse à la foule majoritairement blanche et grisonnante en gilets rouges et tricots et cravates de Noël.

Pas si rose

“Bonsoir à vous, camarades combattants de la liberté !”, commence-t-il avec entrain.

Mais après le laïus sur la réduction des impôts et des dépenses et la suppression des régulations, salué comme toujours par des applaudissements, il change de ton et se lance dans un tableau de l’actualité politique qui n’est pas aussi rose que beaucoup dans la salle semblent le penser.

“Nous devons faire mieux”, assène-t-il, ne suscitant cette fois que de rares applaudissements.

Il explique qu’il faut plus d’argent, plus de bénévolat et une “armée de base plus nombreuse, plus motivée, plus professionnelle – et, mes amis, la gauche possède cette armée.” Les fourchettes cognent contre les assiettes pendant que les gens écoutent en silence.

AFRIK

http://www.courrierinternational.com/article/2013/12/20/le-tea-party-defait-mais-pas-vaincu

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