L’étau se resserre autour de Jovenel Moise

Roberson Alphonse, Le Nouvelliste, Photo Courtoisie Gazette Haiti

Depuis le 7 févier, la rue ne décolère pas. La vague de fond est venue ce samedi de Carrefour où des barricades de pneus enflammées obstruaient les routes, des tirs ont été entendus ainsi que les cris du ras le bol de milliers de poumons exigeant le départ du président Jovenel Moïse. Au fil de la journée, à Delmas, au Canapé Vert, à morne Calvaire, à Carrefour Marassa et ailleurs, les photos et vidéos soutenaient l’évidence de la mise en place d’une opération « lock » de la capitale, d’un étau qui se resserre autour du président Jovenel Moïse.

En milieu d’après-midi, c’est pratiquement sous les fenêtres du président, non loin de sa résidence, à Pèlerin 5, que des pneus enflammés ont été érigés par des riverains en colère après qu’un policier ait brutalisé la conductrice d’un véhicule impliqué dans un accident de la circulation avec le cortège de l’ex-Premier ministre, Jack Guy Lafontant, a rapporté Scoop Fm dans une dépêche.

Le président Jovenel Moïse, poussé dans les cordes par la vie chère et des promesses non tenues, semble perdre de l’emprise sur la situation. Son intervention, la veille, au palais national, en marge d’une rencontre avec des importateurs de riz pour discuter d’un mécanisme pour faire baisser le prix de cette céréale, n’a pas calmé les ardeurs. Le président, affaibli, n’a pas flanché sur un point, la durée de son mandat constitutionnel de cinq ans. Il a écarté l’idée de démissionner.

Le pays lock de fait a des conséquences. La livraison de diesel et de gazoline a été faite dans les deux terminaux, Thor et Varreux mais beaucoup de stations à essence sont en rupture de stock à cause de la tension des trois derniers jours et des routes bloquées, a appris le journal d’une source proche de l’ANADIPP. Il a y des stocks d’essence mais les compagnies ne peuvent assurer sans danger les livraisons.

Pour la compagnie Digicel, l’obstruction des routes rend difficile l’approvisionnement en carburant des sites situés dans plusieurs des points du territoire. Cela peut impacter certains de nos abonnées, craint le responsable de la Digicel Haïti, Maarten Boute, interrogé par le journal. Il y a aussi la difficulté pour des techniciens chargés de l’entretien à rejoindre certains sites, a-t-il poursuivi.

Le secteur textile est impacté par les évènements des derniers jours, a confié au journal Georges Sassine, le président de Association des Industries d’Haïti (ADIH). Pour avoir une idée de ce que perd l’économie haïtienne quand les factories ne travaillent pas, on peut multiplier 53,000 ouvriers par 450 gourdes par jour. En ce qui a trait aux compagnies, je crains qu’elles ne puissent honorer leurs engagements vis-à-vis des donneurs d’ordre, a-t-il poursuivi, inquiet de l’impact de ces événements sur l’attractivité ce secteur qui table cette année sur des exportations de l’ordre de 1 milliard de dollars us.

Si le transport public est très affecté par les manifestations et barricades de l’opération Lock, il n’y a pas d’annulation de vols internationaux . Vers 6 h pm, un vol a relié Port-au-Prince et Miami, a confié une source proche d’une ligne aérienne. L’aéroport est accessible et la police fait un excellent travail pour sécuriser ce site, a-t-elle expliqué au journal, alors que la nuit, lourde d’inquiétudes, s’étendait sur la zone métropolitaine de Port-au-Prince.

Pour certains automobilistes, il a fallu payer le passage à des gens qui tiennent des barricades dans des quartiers situés dans les hauteurs de Pétion-Ville.« Je crains, si une solution n’est pas trouvée, que l’on soit confronté à une multiplication de ces actes. La police ne peut pas tenir chaque quartier, s’est inquiétée une source interrogée par le journal. Ce qui se passe au pays ces jours-ci ressemble à cette période, sous Jean Claude Duvalier, quand on prétendait que « ke makak la pa kase », a poursuivi cette source, préoccupé de constater que le président Jovenel Moïse est resté sourd aux conseils pour éviter que le pays ne sombre dans la violence.

Si le président Jovenel Moïse affiche un détachement le rendant quelque peu décalé par rapport à la gravité de situation, la crainte de débordements est forte. Le temps est le meilleur ennemi du président Moïse, a poursuivi cette source.

Le Nouvelliste Haiti, de Roberson Alphonse.,    https://www.lenouvelliste.com/public/index.php/article/198073/operation-pays-lock-letau-se-resserre-autour-de-jovenel-moise

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