Trump défend sa promesse de construire un mur à la frontière.

Donald Trump s’est adressé à la nation américaine mardi soir pour défendre son idée fixe qu’une crise migratoire menace son pays et qu’il faut un mur à la frontière sud pour y faire face. Il n’a cependant pas décrété l’état d’urgence pour financer la construction promise pendant sa campagne présidentielle de 2016.

Lui-même avait pourtant évoqué la semaine dernière cette option réservée aux situations exceptionnelles. Plus de trente autres états d’urgence demeurent en vigueur aux États-Unis. Le président George W. Bush a utilisé cette mécanique légale après les attaques du 11 septembre 2001.

En lieu et place, le nouveau président républicain a profité de la présentation médiatisée, relayée par les grands réseaux et les nouveaux médias, pour dessiner le portrait apocalyptique d’une frontière avec le Mexique décrite comme un lieu de passage des drogues et des criminels. Pour Donald Trump, cette situation dangereuse justifie le maintien du bras de fer budgétaire avec les démocrates pour les forcer à financer son chantier sécuritaire.

« C’est un cri du coeur et de l’âme », a résumé le leader républicain, qui s’adressait visiblement à ses troupes pour stimuler leur appui dans la guerre de tranchées livrée contre les démocrates.

Des faits ?

Donald Trump a ajouté que « tous les Américains sont touchés par l’immigration illégale » et redit que la frontière laisse passer des criminels et de la drogue à profusion. Il a donné plusieurs exemples de citoyens qui ont été agressés ou tués par des immigrants illégaux.

« Imaginez si c’était la vie de votre enfant, de votre mari, de votre femme qui était brisée de la sorte », a dit M. Trump. Il a répété que le mur serait indirectement financé par le nouvel accord de libre-échange avec le Mexique, une lecture qui ne résiste pas à l’épreuve des faits.

Plusieurs affirmations présidentielles ont d’ailleurs été jugées soit impossibles à vérifier, soit carrément fausses par les vérificateurs de plusieurs médias américains. Le réseau CNN a résumé la situation en parlant d’une « cascade de faussetés sur la frontière ».

Le président a donc fait monter d’un cran la pression dans un climat politique déjà hypertendu avec son discours à la nation relayé par les chaînes généralistes, les réseaux d’information continue et les nouveaux médias des États-Unis. M. Trump, qui a demandé pour la première fois ce temps d’antenne, a symboliquement pris la parole depuis le Bureau ovale, dans l’aile ouest de la Maison-Blanche. L’intervention a duré moins d’une dizaine de minutes.

La présentation exceptionnelle, réservée aux crises nationales ou internationales, avait pour objectif de défendre la tactique présidentielle pour obtenir à l’arraché le financement de la construction d’une partie d’un mur anti-migrants à la frontière avec le Mexique. Il s’agit d’une promesse phare de la campagne républicaine de 2016. « Je pourrais m’entendre avec les démocrates dès demain en 45 minutes », a proposé le président.

Le discours à la nation a été livré après plus de dix-sept jours de paralysie (shutdown) de nombreux services gouvernementaux fédéraux, faute de budget, le président refusant d’approuver les crédits. Environ 800 000 fonctionnaires sont toujours au chômage forcé ou travaillent sans recevoir de paye.

Ce blocage massif se poursuit pour une dix-huitième journée. La fermeture est maintenant l’une des deux plus longues de l’histoire des États-Unis. La plus longue a duré 21 jours, en 1995-1996, sous la présidence de Bill Clinton.

La crise ? Quelle crise ?

Donald Trump et plusieurs ténors républicains jurent qu’ils ne céderont pas tant que les comptes ne réserveront pas environ 5,7 milliards de dollars pour le premier chantier de construction de 440 km de mur. Les dirigeants républicains réclament aussi 800 millions comme « aide humanitaire d’urgence », en clair, de l’argent pour les services aux migrants interceptés aux frontières. La demande a été répétée mardi dans l’allocution à la nation.

Les démocrates ont aussi eu droit à leur temps d’antenne pour expliquer leurs propres positions et répondre au président. La présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a mené la charge.« Le président a choisi la peur et nous, nous voulons commencer par les faits », a-t-elle dit.

Mme Pelosi était appuyée par le sénateur Chuck Schumer de New York. Lui aussi a parlé d’une « crise fabriquée pour attiser la peur et détourner l’attention de la tourmente qui règne dans l’administration ».

Les démocrates ont pris le contrôle de la Chambre basse au début de l’année. Ils restent fermes et unis depuis l’escalade de la confrontation. Ils ne veulent pas financer la barrière frontalière, dispositif jugé aussi immoral qu’inefficace.

« Certains ont laissé entendre qu’un mur est immoral, a d’ailleurs dit le président dans son discours. Alors pourquoi les gens riches bâtissent-ils des murs autour de leur propriété ? »

Ses adversaires misent plutôt sur l’embauche de patrouilleurs (7500 postes du service des douanes et des frontières demeurent vacants) et l’utilisation de nouvelles technologies de surveillance. Donald Trump a fait référence à ces solutions, qu’il approuve, dans son discours.

Des données officielles montrent une diminution importante des entrées illégales aux États-Unis, passées de 1,6 million en 2000 à 400 000 en 2018. Un groupe de recherche indépendant, le Wilson Center, affirme que le taux de criminalité est généralement plus bas dans les comtés près de la frontière mexicaine que dans les comtés des États centraux.

Selon le New York Times, des chaînes de télévision ont d’ailleurs hésité avant de laisser leurs ondes à Donald Trump, jugeant qu’il colporte des exagérations et des faussetés pour créer la crise des migrants et ainsi justifier la construction du mur. Les réseaux avaient refusé du temps d’antenne au président Barack Obama sur la réforme des lois de l’immigration, un sujet jugé alors trop politisé.

La campagne de relations publiques du nouveau président se poursuivra jeudi avec une visite de la frontière dans un des États voisins du Mexique. Donald Trump y rencontrera « ceux qui sont en première ligne », selon une déclaration officielle.

Extrait du Journal :Le Devoir.   https://www.ledevoir.com/monde/etats-unis/545110/le-president-trump-defend-sa-promesse-de-construire-un-mur-a-la-frontiere-mexicaine

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