La présence de l’ancien dictateur Jean-Claude Duvalier à la cérémonie de célébration du 210e anniversaire de l’indépendance nationale aux Gonaïves le 1er janvier 2014 provoque un vif tollé.
Des simples utilisateurs de réseaux sociaux au Collectif contre l’impunité -qui regroupe des victimes engagées dans le procès contre Jean Claude Duvalier- en passant par des voix averties de la société haïtienne, les réactions sont marquées de révolte, de choc et d’indignation.
« L’image du sanguinaire aux Gonaïves encore une fois, une fois de trop à une cérémonie officielle, a encore choqué les victimes. On est en train de banaliser la dictature. On se demande comment l’Etat peut-il poursuivre un individu pour des crimes financiers et en même temps le chef de l’Etat l’invite à une cérémonie officielle ? » s’indigne Danielle Magloire du collectif, contactée par AlterPresse.
Duvalier a été plusieurs fois remarqué dans des cérémonies officielles présidées par Martelly.
Il a aussi été parrain d’une promotion de la faculté de droit des Gonaïves (Nord), commune où l’assassinat de 3 écoliers a précipité son exil en 1986.
Dans un texte qui circule sur internet, le linguiste Robert Berrouët-Oriol, d’origine haïtienne qualifie « la participation éhontée, provocatrice » du dictateur à la célébration de l’indépendance nationale de « provocation qui est en réalité une imposture et un amalgame ».
Parmi les invités d’honneur du président Martelly et de son premier ministre Laurent Lamothe, en plus du dictateur Duvalier, se retrouvait l’ancien général Prosper Avril devenu président de la république suite à un putsch en septembre 1988.
Selon ses dires, Martelly affirme avoir invité tous les anciens présidents d’Haïti vivants à prendre part à la cérémonie des Gonaïves. Seulement deux ont répondu positivement.
Danièle Magloire qualifie les propos tenus à l’occasion par Martelly de « fallacieux et démagogiques discours de réconciliation nationale ».
« Est-ce un hasard que les termes unité nationale soient évoqués par un président de filiation duvaliériste dans une cérémonie officielle où Duvalier est présent, ce à 15 jours du troisième anniversaire du retour du dictateur au pays ?
Faut-il rappeler que le parti duvaliériste dont un des responsables est le ministre de l’intérieur, David Bazile, s’appelle Parti de l’unité nationale ? » se questionne un internaute.
« À l’aune et sous le manteau de l’impunité, et avec la complicité active de l’actuel Exécutif néo-duvaliériste Martelly-Lamothe », ce retour à « visière levée » des bourreaux d’antan ne viserait qu’une « amnistie-amnésie », analysent Berrouët-Oriol et Magloire.
Peut-on parler de « réconciliation » dans l’injustice et l’impunité et sans même la reconnaissance des crimes d’hier ?
Le geste du président Martelly survient quelques semaines après la confirmation par la justice helvétique du détournement de 5 millions de francs suisses par Jean-Claude Duvalier.
Ces avoirs, considérés illicites et gelés en Suisse depuis 1986, pourront même être restitués à Haïti, suite à l’arrêt du Tribunal administratif fédéral (TAF). L’ex-dictateur (…) et ses proches n’ont pas recouru contre la décision du TAF.
Alter Presse
http://www.alterpresse.org/spip.php?article15737#.UssEF-ko45s