16 décembre 1990, un rêve galvaudé

16 décembre 1990, un rêve galvaudé

 

 

Le Nouvelliste | Publié le :                            16 décembre 2013    

   Il y a 23 ans, Haïti élisait pour la première fois son premier président de manière démocratique. Les élections, d’après ce que retient l’histoire, étaient libres, honnêtes et démocratiques. Avec enthousiasme, les Haïtiens, selon les résultats officiels, confiaient la destinée de la nation à l’ancien prêtre de Saint-Jean Bosco, Jean-Bertrand Aristide. C’est un pays debout, un peuple aspirant à un lendemain meilleur, qui célébrait l’entrée en fonction de celui qui incarnait le changement.
C’est ce même peuple qui, pendant trois ans, se mobilisait pour le retour de Jean-Betrand Aristide au pouvoir après le coup d’Etat sanglant du 11 septembre 1991 après seulement sept mois d’exercice du pouvoir. Des anonymes, des commerçants, des militaires, des universitaires, des journalistes…donnaient leur vie en sacrifice pour l’accouchement du 15 octobre 1994. Beaucoup  de rêves prenaient fin prématurément pour permettre au pays de continuer de rêver.
Le retour de l’ancien président Jean-Bertrand Aristide redonnait espoir à tout un pays. L’espoir qu’Haïti ne connaîtra plus jamais de coup d’Etat. L’espoir que les victimes du coup d’Etat sanglant de 1991 trouveront justice. L’espoir que l’économie haïtienne allait être relancée après avoir été affaiblie par les trois ans d’embargo. L’espoir que tous les enfants iront à l’école, que l’environnement sera réhabilité, que la corruption et le crime organisé seront combattus…Bref, l’espoir que les artisans du 16 décembre 1990 allaient retrouver le sourire.
23 ans après, quel bilan ? La manifestation organisée ce lundi par le Parti Fanmi Lavalas pour commémorer cette date historique résume à elle seule le bilan catastrophique. Combien d’anciens membres du Front national pour le changement et la démocratie (FNCD) étaient présents dans les rues aux côtés des centaines de militants lavalas ou à la Fondation Aristide pour la démocratie ? Qui, parmi ceux qui avaient vécu cette date, prenait l’initiative de nettoyer ou décorer son quartier en signe de commémoration ? En dehors des sympathisants lavalas, combien d’entre nous ont célébré cette date ?
Chose certaine, ce 16 décembre a été une journée comme les autres à travers le pays. 23 ans après les élections historiques de 1990, le pays ne trouve pas nécessaire de faire la fête dans la mesure où les promesses n’ont pas été tenues. Les conditions des plus pauvres restent ce qu’elles étaient, si elles ne deviennent pas pires, la classe politique est discréditée, l’économie est moribonde, les jeunes sont inquiets de leur avenir, la société civile garde un profil bas…
23 après, le pays continue de nager dans les eaux troubles sous l’œil des acteurs de l’échec de l’idéal du 16 décembre 1990. Peut-être qu’ils ont besoin de  plus de temps pour reconnaître leurs fautes et demander pardon à la nation ! Ce serait sans aucun doute le premier pas vers la réconciliation nationale qui nous conduirait vers la nouvelle Haïti tant rêvée.
    Jean Phares    Jerome        pjerome@lenouvelliste.com

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