PORT-AU-PRINCE, 28 Septembre â Le prĂ©sident Trump respecte son accord avec le prĂ©sident Jovenel MoĂŻse (diplomatiquement en le soutenant Ă lâinternationale, ainsi quâen matiĂšre de sĂ©curitĂ© publique en armant la police nationale dâHaĂŻti) mais rien pour le peuple haĂŻtien, lâaide Ă©conomique promise lors du sommet de Mar-a-Lago (Floride) oĂč le prĂ©sident haĂŻtien figurait parmi les invitĂ©s caribĂ©ens de Mr. et Mme Donald Trump, ne sâest pas matĂ©rialisĂ©e, HaĂŻti continuant irrĂ©mĂ©diablement sa descente en enfer (prĂšs de 100 gourdes pour 1 dollar amĂ©ricain, et taux dâinflation 20%). Et le seul dans ce cas parmi les autres invitĂ©s.
A qui la faute ?
Lâadministration amĂ©ricaine a pour excuse quâelle insiste pour que le prĂ©sident haĂŻtien forme un âgouvernement dâinclusionâ mais ce dernier nây arrive pas.
Soit personnellement par esprit fonciĂšrement coquin, soit parce que pris entre deux feux entre dâun cĂŽtĂ© les appĂ©tits inĂ©puisablement voraces de ses alliĂ©s politiques et Ă©conomiques, et de lâautre les exigences de son opposition, une opposition cependant trop dispersĂ©e pour formuler une alternative palpable au pouvoir en place.
Mais au fur et à mesure et parce que principales victimes de cette situation, voici les masses qui décident de prendre leur sort en main.
Les derniĂšres manifestations (depuis deux semaines) se caractĂ©risent non seulement par leur violence mais aussi une vĂ©ritable intention de tout casser, non seulement Ă lâendroit des bĂątiments publics (commissariats de police, services publics â Ă©lectricitĂ©, eau etc) mais aussi des Ă©tablissements privĂ©s (magasins, stations dâessence etc), particuliĂšrement dans les hauts lieux de la finance locale que sont les municipalitĂ©s de PĂ©tionville et Delmas (au nord de la capitale).
Cependant les forces de police dĂ©montrent soudainement une stratĂ©gie plus subtile pour faire face et limiter les dĂ©gĂąts, qui auraient pu ĂȘtre tragiques.
Mais la question nâen demeure pas moins : quâest-ce qui reste pour le pays rĂ©el de lâaccord Trump-Jovenel ?
Jusquâici absolument rien.
Mr. Trump sâen rĂ©jouit visiblement, tandis que le prĂ©sident haĂŻtien, comme promis par son puissant protecteur, puissant mais aussi et surtout incontournable, peut continuer Ă rĂ©sister malgrĂ© les coups de boutoir de plus en plus rĂ©solus de ses opposants, outre lâentrĂ©e en scĂšne des masses de plus en plus aguerries, surgissant de tous les coins du pays, mais Ă©galement (et important Ă signaler) de toutes les strates sociales et pas seulement des milieux les plus dĂ©favorisĂ©s.
Un vrai ras-le-bol quâon dirait.
Cependant malgrĂ© les nouvelles les plus alarmantes venant du cĂŽtĂ© de son alliĂ© haĂŻtien, et quoique rĂ©percutĂ©es dĂ©sormais par des mĂ©dias internationaux, lâadministration Trump reste indiffĂ©rente Ă ce sujet.
Lors de la rencontre, le jeudi 26 septembre, entre le SecrĂ©taire dâEtat adjoint John Sullivan et le chancelier haĂŻtien Bocchit Edmond, on fit Ă peine rĂ©fĂ©rence aux Ă©vĂ©nements qui se dĂ©roulent en mĂȘme temps en HaĂŻti, lâamĂ©ricain continuant dâespĂ©rer que les âacteurs politiques (haĂŻtiens) trouveront bientĂŽt une entente afin de former un gouvernement qui ⊠devra ĂȘtre ancrĂ© dans la dĂ©mocratie et lâĂ©tat de droit.â
La rencontre avait Ă©tĂ© convoquĂ©e par lâadministration Trump en vue de prĂ©senter ses fĂ©licitations au gouvernement haĂŻtien âpour son vote lors de la rĂ©union des Etats membres du TraitĂ© InteramĂ©ricain dâAssistance Mutuelle (TIAR)â.
Objectif : âAdresser les menaces contre la paix et la dĂ©mocratie que reprĂ©sente le gouvernement de Maduro dans les AmĂ©riques.â
Lors de cette rĂ©union du TIAR qui sâest tenue Ă New York, en marge de la 74e AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale de lâONU, durant la semaine du 23 au 28 septembre, on apprend que âHaĂŻti (a) occupĂ© le poste de vice-prĂ©sident de lâOrgane de Consultation du TIARâ.
Tout pour Jovenel Moïse et ses précieux conseillers, RIEN pour Haïti !
Certes les Duvalier allaient mĂȘme au-devant des demandes des AmĂ©ricains dans le cadre de la lutte contre le communisme, en en profitant bien entendu pour massacrer leurs ennemis vrais ou faux, mais avec Jovenel MoĂŻse : HaĂŻti tout simplement nâapparait pas dans le deal conclu.
HaĂŻti nâexiste pas !
Depuis que le prĂ©sident haĂŻtien (qui est en vertu de la Constitution en vigueur, responsable en chef de la politique Ă©trangĂšre du pays) a dĂ©cidĂ© de mettre le vote dâHaĂŻti totalement, pour ne pas dire servilement, sous la dĂ©pendance de la diplomatie amĂ©ricaine, ce dans le cadre des manĆuvres de lâadministration Trump pour renverser le prĂ©sident dit socialiste du Venezuela, Nicolas Maduro, câest comme qui dirait les problĂšmes Ă©conomiques dâHaĂŻti nâont fait que dĂ©cupler : par exemple, la crise du carburant devient endĂ©mique (alors que Mr. Trump se targue que les Etats-Unis sont devenus le premier producteur du monde) et le reste sâensuit.
Seuls peut-ĂȘtre les proches associĂ©s de Jovenel MoĂŻse dans le cadre de ce deal, qui ont pu tirer les marrons du feu mais HaĂŻti, au contraire, a perdu au change.
En effet, dans le cadre toujours de lâaccord vĂ©nĂ©zuĂ©lien Petrocaribe, et malgrĂ© lâutilisation scandaleuse quâen ont fait des responsables haĂŻtiens, le gouvernement Maduro nâa jamais manquĂ© de continuer Ă voler au secours de notre pays dans les cas extrĂȘmes, comme celui que nous traversons.
Cependant mĂȘme dans la comparaison avec la dictature Duvalier, on ne peut omettre que lâintĂ©rĂȘt dâHaĂŻti avait sa place. Certes la dictature considĂ©rait que le pays lui appartient en tant que maĂźtre et seigneur mais le pays nâen existait pas moins.
Aujourdâhui pour nos dirigeants, HaĂŻti nâexiste pas !
Seul compte leur intĂ©rĂȘt personnel, leur magot et quâils dissimulent bien entendu soigneusement Ă lâextĂ©rieur.
VoilĂ pourquoi encore la complicitĂ© des grandes capitales du monde, leur est prĂ©cieuse. Plus que lâopinion du peuple haĂŻtien.
Un exemple signalé par le sénateur Youri Latortue, quoique un transfuge du parti au pouvoir (PHTK).
PrĂ©sident de la commission anti-corruption du SĂ©nat haĂŻtien, Youri Latortue signale que pour le voyage du chef de lâEtat haĂŻtien aux Nations Unies devant lesquelles il devait se prononcer le jeudi 26 septembre Ă©coulĂ©, ce ne sont pas moins de 348.000 dollars amĂ©ricains qui ont Ă©tĂ© dĂ©bloquĂ©s – 298.000 extraits dâun compte en banque de lâambassade dâHaĂŻti Ă Washington avec les revenus de la vente du passeport haĂŻtien et 60.000 dâun compte Ă lâordre du consulat dâHaĂŻti Ă New York.
Or non seulement mĂȘme lâArabie saoudite ou les riches Ă©mirats du Golfe, qui nâont besoin dâun tel pactole (348.000 dollars amĂ©ricains !) pour un dĂ©placement de trois jours de leur plus haute autoritĂ© aux Nations Unies (NY), voilĂ que le prĂ©sident Jovenel MoĂŻse dĂ©cidera finalement dâannuler son voyage vu lâaggravation de la crise politique en HaĂŻti.
OĂč sont passĂ©s les 348.000 dollars ?
Câest ce genre de scandales, en mĂȘme temps que la crise politico-Ă©conomique finit de plus en plus par toucher tous les secteurs de la sociĂ©tĂ©, aussi bien aujourdâhui les have que les have not, avec la menace de destruction pesant aussi sur les intĂ©rĂȘts privĂ©s commerciaux comme cela sâest prĂ©cisĂ© lors des derniĂšres manifestations, câest cela qui finira par emporter (peut-ĂȘtre) le deal Trump-Jovenel.
En jetant toute la société généralement quelconque, dans la bataille.
Comme cela a commencĂ© avec lâĂ©clatement de certaines institutions pas comme les autres et qui se sont targuĂ©es depuis toujours de leur apolitisme.
Marcus-HaĂŻti en Marche, 28 Septembre 2019
https://haitienmarche.com/index.php?option=com_content&view=article&id=13438
Comments are closed.