Cette arrestation fait aujourd’hui les gros titres de la presse en Haïti. Et pour cause, Maître André Michel est, selon le quotidien Le Nouvelliste, « l’un des plus farouches opposants au président Martelly ». Il a été arrêté hier soir après dix-huit heures, ce qui est interdit par la Constitution selon Jean Renel Sénatus, ex-commissaire du gouvernement de Port-au-Prince, cité par le quotidien.

L’arrestation de l’opposant a provoqué un début d’émeute dans le sud de la capitale. La foule, très remontée, reprochant aux policiers une arrestation sans fondement, a tenté de bloquer « la chaussée avec des blocs et des pierres ». Des pierres qui ont également été jetées sur les forces de l’ordre. La réponse ne s’est pas fait attendre : « rafales d’arme automatique […] des policiers lançant des grenades lacrymogènes et qui ensuite chargent la foule ». Le récit par Le Nouvelliste de cette soirée dans la banlieue de la capitale est éloquent.Pourquoi cette arrestation ?

Il existe la version officielle et celle du camp de l’avocat. En fait, selon le site Alter Presse, un réseau alternatif haïtien d’information, un mandat d’arrêt a été émis le 25 juillet dernier contre cet avocat dans le dossier de l’assassinat d’un jeune universitaire de 31 ans. « Un dossier monté de toutes pièces » selon les partisans de Maître André Michel, cités par Le Nouvelliste.

Ces derniers estiment que cette arrestation est une mesure de rétorsion suite à l’ouverture par Maître André Michel d’un dossier contre la première dame Sophie St-Rémy Martelly et son fils aîné Olivier Martelly. Il les accuse de corruption.

Une affaire prise en main par le juge Jean Serge Joseph, décédé en juillet dernier. Ce juge avait justement cité à comparaître de grands commis de l’Etat, dont des ministres, d’après Le Nouvelliste. Depuis, le rapport d’une commission d’enquête réclame que la justice haïtienne poursuive le président Michel Martelly, ainsi que le Premier ministre Laurent Lamothe et le ministre de la Justice. Selon ce rapport, ces derniers auraient menacé le défunt juge pour qu’il abandonne les poursuites.

L’arrestation de Maître André Michel, qui vient de passer sa première nuit en détention, suscite de très nombreuses réactions sur les réseaux sociaux.

Une arrestation qui donne lieu à un éditorial au vitriol dans le quotidien Le Nouvelliste

Le titre est éloquent : « Vers un lit douillet où s’abîment les convictions ». En voici quelques extraits :

« L’arrestation d’un avocat n’est jamais un acte banal. Quand l’intéressé se double d’une figure politique, il n’y a rien d’anodin à vouloir le réduire au silence dans un cachot. Les autorités politiques, la présidence, la primature et chaque ministre de ce gouvernement se laveront les mains et jureront de leur innocence dans cette affaire ; n’empêche que la liste des prisonniers politiques s’allonge, estime le quotidien haïtien, avant d’ajouter, qu’il est urgent que le pouvoir en place éclaircisse les doutes qui s’installent ».

Rappelant que « le dialogue est au point mort », Le Nouvelliste estime que « les élections ne peuvent se tenir », puisque « les opposants finissent embastillés ».
Et de conclure qu’ « aujourd’hui plus qu’hier, la carte routière devant conduire vers l’État de droit a besoin d’un urgent coup de brosse à reluire et d’engagements clairs ».

Caraibes & RFI.,    http://www.radiotelevisioncaraibes.com/nouvelles/haiti/rfi_autour_de_l_arrestation_de_mtre_andr_michel.html