Poisson vorace. Il est dangereux de nager parmi les piranhas.

odd Piranha Catch

 Ces poissons que l’on trouve en eaux douces en AmĂ©rique du Sud sont de redoutables prĂ©dateurs. Le piranha noir par exemple a la mĂąchoire la plus puissante du monde animal, actuel et prĂ©historique
 MĂȘme la mĂąchoire du redoutable Tyrannosaure Rex n’avait probablement une force Ă©quivalente Ă  30 fois le poids total de son propriĂ©taire.

Les piranhas véhiculent les représentations les plus angoissantes, un peu comme les requins
 Hollywood y est certainement pour quelque chose
 Si tout le monde se souvient des Dents de la Mer, en 1975, Spielberg oblige, on oublie parfois que le film Piranhas, en 1978, avait bien marqué les esprits lui aussi.

Mais l’histoire est antĂ©rieure Ă  ces films Ă  succĂšs
 Elle a dĂ©marrĂ© avec une partie de chasse au BrĂ©sil de l’ex-PrĂ©sident amĂ©ricain Theodore Roosevelt en 1913. Histoire qu’il en ait pour son argent, ses hĂŽtes ont affamĂ© des piranhas dans un bassin isolĂ© et y ont jetĂ© une vache vivante, sous ses yeux Ă©bahis. Selon ses mĂ©moires, la pauvre vache n’est pas restĂ©e vivante longtemps. En moins d’une minute, les piranhas, toujours trĂšs organisĂ©s,  l’avaient dĂ©vorĂ©e jusqu’à la derniĂšre miette et son squelette flottait lamentablement Ă  la surface. S’il y a plein de lĂ©gende populaires en Amazonie depuis toujours au sujet de ces poissons gourmands, la lĂ©gende occidentale, elle, est nĂ©e Ă  ce moment lĂ .

Pourtant les piranhas (pas plus que les requins d’ailleurs) ne sont spĂ©cialement dangereux pour l’homme, en gĂ©nĂ©ral. Pour l’homme vivant, je veux dire
 Effectivement, donnez-leur un cadavre, ils n’en font qu’une bouchĂ©e, mais un nageur en pleine forme


J’ai Ă©pluchĂ© l’internet mondial dans tous les sens pour trouver au moins un article sensationnaliste qui raconterait comment un baigneur innocent  se serait fait dĂ©vorer jusqu’au squelette en 30 secondes par une bande de piranhas gloutons, et
 Nada! Pas un seul cas documentĂ© sur la planĂšte de mort par piranha au cours des 150 derniĂšres annĂ©es (le dernier cas remonterait Ă  1870!)

Par contre, j’ai bien trouvĂ© un article intĂ©ressant dans la littĂ©rature scientifique de cette derniĂšre dĂ©cennie. C’est sanglant mais pas mortel. Et il s’agit, comme pour l’histoire de Roosevelt, d’une situation exceptionnelle. D’une combinaison de facteurs qui a poussĂ© une variĂ©tĂ© particuliĂšre de piranhas, dans un contexte particulier Ă  attaquer des humains. En bref, les piranhas se sont retrouvĂ©s littĂ©ralement affamĂ©s et cela a affectĂ© leur comportement. La victime de la blessure la plus sĂ©vĂšre s’est quand mĂȘme retrouvĂ©e amputĂ©e d’un orteil.

Morsure fraĂźche de piranha, juste sous le talon. Source http://goo.gl/Tod9r

Morsure fraĂźche de piranha, juste sous le talon. Source http://goo.gl/Tod9r

C’était au dĂ©but des annĂ©es 2000. Au Sud-Est du BrĂ©sil, dans le canal d’alimentation d’un barrage, prĂšs de la ville de Santa Cruz de Conceic Ì§ĂŁo (3’500 habitants). Des piranhas mouchetĂ©s (Serrasalmus maculatus) se sont subitement mis Ă  mordre les baigneurs. GĂ©nĂ©ralement au niveau du talon. Et ça fait mal. La morsure caractĂ©ristique a une forme de cratĂšre, car les piranhas ne mĂąchent pas, ils dĂ©coupent. Leurs dents du haut et du bas, aiguisĂ©es comme des rasoirs, s’emboĂźtent parfaitement, comme si des douzaines de ciseaux se refermaient en mĂȘme temps de maniĂšre parfaitement synchronisĂ©e. Toute morsure ramasse donc un bout de chair en passant (illustration ci-contre). Ce type de blessure nĂ©cessite une prise en charge mĂ©dicale pour Ă©viter les complications.

IntriguĂ©s par ce phĂ©nomĂšne nouveau, des chercheurs se sont rendus sur place et ont publiĂ© leurs observations dans une revue mĂ©dicale dont je me suis inspirĂ© ici. Au plus fort de la crise, il y a eu 38 morsures pour quelque 2000 baigneurs dont chacun a barbotĂ© pendant 30 minutes environ les jours les plus chauds. Et aucun piranha n’a mordu plus d’une fois. Ils n’ont peut-ĂȘtre pas trouvĂ© l’humain trĂšs bon?

Puis le temps a fini par se rafraĂźchir, leur environnement est devenu moins hostile, et les voraces prĂ©dateurs se sont calmĂ©s. Les chercheurs pensent que ce comportement exceptionnel Ă©tait dĂ» Ă  une combinaison de facteurs exceptionnels. Comme pour la vache de Roosevelt, ces piranhas Ă©taient affamĂ©s et en surnombre dans un environnement artificiel aux ressources trĂšs limitĂ©es. Ils Ă©taient simplement sur le point de mourir de faim et cela les a rendus particuliĂšrement voraces. Ces mĂȘme chercheurs estiment Ă©galement qu’avec l’augmentation constante du nombre de barrages au BrĂ©sil, il est Ă  prĂ©voir que des Ă©pisodes comme celui-lĂ  se produisent Ă  nouveau.

Mais en attendant le prochain barrage, rappelons-le, c’est tout Ă  fait exceptionnel.  Comme nous le disait notre auditrice HĂ©lĂšne Wal dans son extraordinaire tĂ©moignage de Guyane, en conditions normales, l’agressivitĂ© des piranhas envers l’ĂȘtre humain est un mythe. Contrairement aux idĂ©es reçues, la cohabitation se passe trĂšs bien. Pour les humains. Sans doute un peu moins pour les piranhas.

On peut donc affirmer sans ambiguitĂ© et malgrĂ© les anecdotes narrĂ©es Ă  l’instant que c’est bel et bien une intox! Il n’est pas dangereux de nager parmi les piranhas.

Je ne rĂ©siste pas Ă  l’envie de reproduire ici ces formidables lignes d’HĂ©lĂšne (nous les avions lues dans l’épisode 136).
Bonne lecture!

“Atapou?” (salut, tu passes une bonne soirĂ©e?) “atapou yĂ©â€ (oui ça va, bonsoir Ă  toi) ça c’est la langue d’ici: de Guyane, enfin d’une rĂ©gion de Guyane: sur les rives du Maroni.

Coucher de soleil sur le Maroni. Image Wikipedia

On l’appelle le taki taki et les anglophones que vous ĂȘtes pourront vite trouver le lien avec l’anglais, bref. Je vous apporte mon tĂ©moignage d’Amazonie. Dans ce coin du globe, nous n’allons pas nous distraire au pub pour une partie de billard mais en forĂȘt pour une partie de pĂȘche. On cherche un endroit proche d’une crique, idĂ©al pour le bain du matin mais surtout pour y trouver assez aisĂ©ment de l’aĂŻmara: un dĂ©licieux poisson Ă  la chaire tendre et Ă  la diffĂ©rence du piranha, sans trop d’arĂȘtes. Il faut poser les trappes le soir et les relever avant le lever du jour. Sinon quoi? Un de mes amis a testĂ© pour vous! Alors que le soleil avait dĂ©jĂ  bien fait son entrĂ©e dans la forĂȘt, il se dĂ©cide Ă  la hĂąte de relever les trappes au bout d’une desquelles est accrochĂ© un bel aĂŻmara. Éprouvant un peu de difficultĂ© pour sortir le poisson il se dĂ©cidĂ© Ă  rentrer dans la crique. L’eau parvient jusqu’à hauteur des cuisses. Mais au moment oĂč il soulĂšve la trappe, il est dĂ©jĂ  trop tard, les piranhas qui avait dĂ©jĂ  commencĂ©s leur petit dĂ©jeuner sont furax de devoir dĂ©jĂ  le sacrifier et lui font payer cher (!!) cette petite contrariĂ©tĂ© matinale: un bon morceau de chair qui laissera une belle cicatrice en forme de O sur la cuisse pendant plusieurs annĂ©es. Morale de l’histoire: il faut prĂ©voir d’apporter son rĂ©veil en forĂȘt! Mais, ton ami ne nageait pas! Donc t’es hors sujet HĂ©lĂšne, O pointĂ©! Et c’est lĂ  que mon expĂ©rience s’exprime. Pendant un an, j’ai vĂ©cu au bord du Maroni avec les coutumes locales: tournĂ©e vers le fleuve. Pour faire court, je me lavais, ma baignais (“washi” est le terme unique pour ses deux verbes) avec les enfants pendant que d’autres pĂȘchaient. Et tout ça dans un espace assez rĂ©duit (genre 5 Ă  10 m2). Et je vous laisse deviner ce qu’ils ferraient le plus souvent: des piranhas!! Et jamais un blessĂ©. Alors non, il n’est pas dangereux de NAGER avec les piranhas. J’ai pas 0 lĂ , n’est-ce pas? Did I succeed?

Le saviez-vous?

Le nom “piranha” vient de la langue Tupi, du BrĂ©sil. C’est un mot-valise composĂ© de “pira” (poisson) et de “ranha” (dent). Les piranhas sont les poissons-dents!

Il est dangereux de nager parmi les piranhas. Info ou intox?

Podcastscience.  Source

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