Qui fera bande à part ?

 

Le Nouvelliste | Publié le : 22 janvier 2014

On n’y croyait pas trop, c’est devenu une réalité ce mercredi. Le dialogue est lancé.
Sous les auspices de la Conférence épiscopale d’Haïti, les principaux partis politiques haïtiens ont commencé à se parler.
C’est un premier pas. En fait, cela fait des jours que, de petits gestes en mots gentils, les acteurs s’apprivoisent. Arrondissent les angles pour mettre en boîte des idées neuves.
Le président Michel Martelly a la bouche remplie de miel et la posture la plus présidentielle possible. Les conseillers du président, les faucons de 2013, ont mis de l’eau dans leur bol de fiel. Le président du Sénat et tous les parlementaires se sont assagis et ont rentré leurs griffes. L’opposition radicale s’est démobilisée. Les autres partis politiques se sont, centimètre par centimètre, rapprochés de la table. Pour huiler les derniers engrenages, les ambassades se sont gardées de toutes déclarations fracassantes et ont encouragé tous les camps à se retrouver. Le reste est un miracle de l’Eglise catholique et de sa diplomatie discrète.
Nous sommes au stade 1 du dialogue, la liste des revendications s’allonge. Il y en a de farfelues dans une République régie par une Constitution démocratique et d’autres qui ne nous feront pas avancer d’un pouce vers la solution des problèmes.
Au fur et à mesure que le processus prendra forme, des illusions devront fondre comme neige au soleil et des ego s’aplatir devant la réalité. Mais, si l’opposition n’a pas toute la force qu’elle pense détenir et l’exécutif toute l’adresse qu’elle espère, les problèmes sont réels. Nous sommes bloqués à un délicat carrefour.
Entre les partis sociaux-démocrates qui veulent rebattre les cartes en ne gardant que le président (il faut, selon eux, changer de premier ministre et de programme de gouvernement), les extrémistes qui lorgnent le fauteuil présidentiel lui-même et les petits partis qui rêvent de distribution de postes avant les élections, le président Michel Martelly devra jeter du lest pour pouvoir mettre l’accent sur l’obligation de ne pas sortir des rails du processus démocratique.
En Haïti, le dialogue, comme toute mécanique complexe, nous fascine. Rien ne dit cependant que nous irons au bout du processus. Il y a eu des surprises ces derniers mois. Pour un oui, pour un non, les acteurs changent d’avis et remettent tout en cause. Il est donc urgent d’attendre, d’avancer un pas à la fois.
Le prochain test sera de compter les heures ou les jours qui s’égrèneront avant que Lavalas et Mopod acceptent de s’asseoir autour de la table ou qu’ils se retirent du jeu après avoir réalisé que le dialogue se fait sans eux.
Frantz Duval duval@lenouvelliste.com Twitter:@Frantzduval

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