Un accord intérimaire sur le programme nucléaire iranien a été conclu à Genève entre la République islamique et six grandes puissances. Les premières sanctions contre l’Iran seront levées en décembre.
Après cinq jours d’âpres négociations, les grandes puissances et l’Iran ont annoncé être parvenus à un accord au terme duquel larépublique islamique acceptera de limiter son programme nucléaire en échange d’un allègement des sanctions économiques. Cet accord ouvre une nouvelle période de pourparlers sur le fond pendant six mois.
Un accord historique?
Oui et non.
Oui car c’est la première fois que la République islamique semble réellement disposée à se plier à un accord international, en acceptant notamment des contraintes et des vérifications inédites de ses engagements. De fait, cela fait 10 ans que les grandes puissances tentent sans succès d’obtenir que le pays applique les traités de non-prolifération nucléaire et qu’il cesse ses activités d’enrichissement de l’uranium.
Non car il ne s’agit pas encore d’un accord historique mais d’un “plan d’action” intérimaire avant le véritable accord définitif qui pourrait intervenir dans six mois. Ces premières mesures doivent permettre de vérifier la bonne foi de Téhéran tout en commençant à alléger les sanctions.
“Cet accord assure la survie du régime”, tranche sur France 3 Christian Malard, consultant pour les questions diplomatiques internationales, qui rappelle qu”il y a 10 ans, l’actuel président iranien Hassan Rohani, qui négociait déjà le nucléaire, s’était félicité d’avoir roulé les Occidentaux dans la farine”.
Ce que l’accord prévoit pour le nucléaire iranien
L’Iran s’est engagé à une profonde révision de son programme nucléaire et se soumettra à des inspections internationales plus poussées. La République islamique s’engage à:
– Cesser tout enrichissement d’uranium “à plus de 5 % et démanteler les processus techniques nécessaires pour enrichir à plus de 5 %”.
– Neutraliser “son stock d’uranium enrichi à près de 20% en le diluant”.
– Arrêter la construction de toute nouvelle centrifugeuse à uranium. Le pays a cependant le droit de remplacer les centrifugeuses déjà existantes.
– Interrompre les travaux menant à la mise en marche d’un réacteur dans l’usine d’Arak ainsi que la production de combustible à destination de cette centrale, deux points particulièrement défendus par la France.
– Renoncer à construire une “usine capable (…) d’extraire du plutonium à partir du combustible usagé”.
– Permettre un “accès quotidien de ses sites de Natanz et Fordow à des experts de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA)” ainsi qu’à ses usines de fabrication de centrifugeuses et aux mines d’uranium.
Les concessions sur les sanctions
L’accord de dimanche desserre l’étau de certaines des sanctions. Il n’y en aura pas de nouvelles dans les six prochains mois si l’Iran respecte ses engagements. Selon Laurent Fabius, les premières levées de l’Union Européenne auriont lieu en décembre.
“Certaines sanctions sur l’or et les métaux précieux, le secteur automobile et les exportations pétrochimiques de l’Iran” vont être suspendues; “des réparations et des inspections en Iran pour certaines compagnies aériennes iraniennes” vont être permises. Par ailleurs, le versement de 400 millions d’euros pour financer les études d’étudiants iraniens à l’étranger va être autorisé. Les liens humanitaires (achat de nourriture ou de matériel médical) entre l’Iran et le reste du monde vont être favorisés. Enfin, 4,2 milliards de dollars issus de sanctions sur les ventes de pétrole iranien vont être débloqué.
En revanche, la plupart des sanctions américaines, commerciales et financières, resteront en vigueur dans les six mois à venir, comme les sanctions décidées par le Conseil de sécurité de l’ONU.
L’ambiguïté sur le droit à l’enrichissement
Le texte laisse une part d’ambiguïté qui permet des interprétations divergentes. “Le droit à l’enrichissement d’uranium sur le sol iranien a été accepté”, a ainsi déclaré le président iranien Hassan Rohani. L’accord “ne dit pas que l’Iran a le droit à l’enrichissement, quoiqu’en disent certains commentaires en l’interprétant”, a assuré au contraire le secrétaire d’Etat américain, John Kerry.
Le chef de la diplomatie britannique, William Hague, a tenté de rendre les choses plus claires: “Dans le cadre d’une solution complète, si nous atteignons le stade suivant de cette solution complète, l’Iran sera en mesure de jouir de ses droits fondamentaux à disposer de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, ce qui impliquera ce que nous appelons un programme d’enrichissement mutuellement défini et limité aux besoins pratiques”.
Qui est pour? Qui est contre?
L’ensemble des grandes puissances est favorable à cet accord conclu avec les 5+1 (Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie et Allemagne).
Seule voix vraiment négative, Israël a dénoncé un “mauvais accordqui offre exactement ce que l’Iran voulait: la levée significative des sanctions et le maintien d’une partie significative de son programme nucléaire”, puisqu’il “laisse en place les centrifugeuses”, selon le bureau du Premier ministre Benjamin Netanyahu. Celui-ci a ensuite qualifié l’accord “d’erreur historique.