Martelly tacle le Sénat

Cour des comptes

Martelly tacle le Sénat
Le Nouvelliste | Publi le :25 octobre 2013
 Roberson Alphonse
Autour de la nomination des membres de la Cour supérieure des Comptes et du Contentieux administratif, le président de la République et celui du Sénat se livrent à une bataille ouverte à coup de lettres. Cela dure depuis près d’un mois et pour le moment la principale instance de contrôle du budget national ne sait sur quel pied danser.
Si le Premier ministre Laurent Lamothe a écrit au président Desras pour lui dire d’ignorer la lettre qu’il lui avait adressée par erreur le 23 octobre, le président Martelly lui est à sa deuxième correspondance au Sénat au sujet du CSC/CA. Le président de la République, Michel Joseph Martelly, favorable à un vetting sur sept des dix nouveaux conseillers à la CSC/CA élus récemment par le Sénat, montre ses cartes. Dans une correspondance adressée au président du de la Chambre haute, Simon Dieuseul Desras, le 23 octobre 2013, le chef de l’Etat relève que « ces sept candidats choisis sur 101 postulants ont des liens directs et privilégiés avec le Parlement ». « Ces liens, détaille Michel Martelly, vont à la fonction d’ancien sénateur, d’ancien député, de président de commission et de président de l’assemblée, de secrétaire général jusqu’à celle de chef de campagne de sénateur, et j’en passe ». « Est-ce un hasard ?», s’est-il demandé, ajoutant que : président de la République, il a la « responsabilité d’assurer l’équilibre au sein des pouvoirs publics et des institutions ». Ces sept nouveaux conseillers, indique Michel Joseph Martelly, ont été choisis tandis que 25 candidats à ces postes, des fonctionnaires de la CSC/CA, n’ont pas eu droit même à une audition. « Leurs dossiers ont été rejetés en bloc », soutient le président de la République qui place la barre très haut pour le Sénat.
« Je voudrais que me soit communiqueé une copie du certificat de décharge de tous les postulants retenus ayant été comptables de deniers publics », demande Martelly, expliquant « qu’il existe des comptables de deniers publics de droit ou de fait ». Dans les deux cas, souligne le chef de l’Etat, « la CSC/CA doit attester que quelqu’un, à l’occasion de sa gestion, a eu – ou n’a pas eu – à faire acte de comptable de l’Etat ».
« En ce sens, enchaine-t-il, l’acte de décharge ou un certificat négatif en bonne et due forme délivré par la CSC/CA concernant tous ces postulants comptables de deniers publics retenus ainsi que leur déclaration définitive d’impôt manquent aux dossiers que vous m’avez communiqués », écrit le président qui s’est appesanti sur le cas d’un conseiller élu en particulier. « Relativement au cas d’un ancien employé de l’ONA retenu au nombre des dix conseillers sélectionnés, je suggère que le Sénat conduise, au plus tôt, une enquête sur son passage à cette institution. Une telle enquête pourrait nous éviter un scandale de plus dans la conduite des affaires de l’Etat », conseille le chef de l’Etat au président du sénat, Simon Dieuseul Desras.
Dans une autre correspondance datée du 4 octobre 2013 adressée à la présidente de la CSC/CA demandant « aux actuels conseillers de rester en poste jusqu’à la fin de l’évaluation qui sera conduite sur l’intégrité du processus qui a abouti à la désignation des nouveaux membres », Michel Joseph Martelly explique son refus de publier les noms de ces derniers dans Le Moniteur. « Si les deux assemblées constituantes, qui ont donné naissance à la constitution de 1987 et aux amendements de 2011 voulaient que le président de la République soit catégoriquement exclu du choix des conseillers de la CSC/CA, elles n’auraient pas décidé que c’est à lui qu’il revient d’exercer le processus final de la validité de leur nomination par la publication dans le journal officiel Le Moniteur. Appelez cela comme vous voulez, la nomination effective prend effet à partir de l’acte posé dans Le Moniteur », selon le président Michel Joseph Martelly ajoutant qu’il n’y a pas de présidence collégiale, allusion à un échange de correspondance avec le président du Sénat, Simon Dieuseul Desras arguant que « la Constitution ne reconnait au président de la République que deux seules décisions personnelles et unilatérales : la convocation à l’extraordinaire du Parlement et l’arrêt de nomination du Premier ministre ».
Très remonté, Simon Dieuseul Desras, dans une lettre datée du 1er octobre en réponse à celle du 30 septembre du président Martelly, avait qualifié les réserves présidentielles « d’insulte cinglante » pour la commission sénatoriale qui a conduit l’enquête et le Sénat qui a voté ces nouveaux membres de la CSC/CA. Le président de la Chambre haute soutient plus loin que le président viole de manière flagrante le principe de séparation des pouvoirs. Le Sénat a voté ces conseillers en vertu de l’article 200-6 de la Constitution.
Le 3 septembre 2013, le Sénat avait voté Nonie Henriette Mathieu, Saint Juste Momprevil, Jean Ariel Joseph, Fritz Robert Paul, Rogavil Boiguene, Arol Elie, Marie Neltha Fethière, Mehu Melius Garçon, Marie France H. Mondésir et Pierre Volmar Demesyeux au poste de conseillers à la CSC/CA.
A quand la fin de cette saga ? Personne ne le sait. Cependant, certains trouvent ce qui semble être un indice dans la lettre du président Michel Joseph Martelly, la présidente de la CSC/CA : « Vous n’ignorez pas que vos prédécesseurs sont restés en près 20 mois en poste après l’expiration de leur mandat ». Nos tentatives pour entrer en contact avec le président du Sénat vendredi en fin de soirée ont été vaines. A la Cour des comptes, c’est le silence complet.
Roberson Alphonse
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